
CITATIONS CHRONOLOGIQUES SUR A.M.CASSANDRE
Cette compilation de citations révèle la trajectoire exceptionnelle d'un créateur visionnaire, constamment en avance sur son temps, passant du triomphe à l'incompréhension, de la révolution à la solitude, laissant une œuvre qui continue d'irriguer la création contemporaine.
FORMATION ET DÉBUTS (1919-1922)
Maximilien Vox (qui l'a croisé à cette époque) :
"Un garçon de taille petite mais robuste, le front clair, les yeux profonds, souriant mais parlant peu, tantôt rêvant, tantôt calculant, ami des fleurs, des livres et du silence. Ainsi nous apparut Cassandre."
R.L. Dupuy, critique de Vendre (1925) :
"Cassandre est un jeune homme qui, ayant du talent, a eu de plus la bonne fortune de ne pas voir les professeurs chevronnés prendre en charge ce talent. Il fut sur les tabourets de l'académie Julian un travailleur libre, forgeant sans autre règle que la sienne, sa façon de traduire ce qu'il voyait avec ses yeux."
Hachard (son premier éditeur, vers 1922) :
"Ce que vous faites est invendable, mais prodigieusement publicitaire."
LA RÉVOLUTION DU BÛCHERON (1923-1925)
Pierre Andrin, L'Affiche (1926) :
"Les moins initiés aux choses publicitaires comprirent qu'une révolution venait de s'accomplir dans l'art de l'affiche."
Bernard Champigneulle (souvenir de 1950) :
"C'est en 1923 que je vis sur les murs de Paris cette affiche percutante et, à cette époque, insolite où dans un rayonnement d'étrange lumière, un bûcheron vigoureux abattait un arbre à la cognée. Tout s'y inscrivait dans un rythme simple et sûr. Le regard était naturellement conduit vers le nom de la firme à célébrer. Clarté, schématisme, dynamisme, symbolisme perceptible, vigueur d'exécution, tout y était."
Henri Sauguet :
"Plus encore qu'elle faisait connaître de Bûcheron pour lequel elle avait été composée apprendre son nom et avec ce nom un nouveau sens de l'image, de l'emploi des lignes."
R.L. Dupuy sur les panneaux géants :
"Celui [le panneau] de la place Clichy, avec ses orbes colorées, est d'une puissance d'appel particulièrement étonnante. Les gens s'arrêtent bouche bée. Evidemment, ils sont tous un peu estomaqués. Ils le seraient à moins ! 'Tiens, du cubisme s'écrient-ils'. Cubisme si vous voulez, mais si ce cubisme a attiré vos regards, il a rempli son office."
L'ATTAQUE DE L'ESPRIT NOUVEAU (1924)
Ozenfant et Le Corbusier, L'Esprit nouveau n°25 (juillet 1924) :
"Le tumulte est dans les rues. Le Bûcheron pavoise au boulevard Saint-Germain. En dix jours, le cubisme, sur un kilomètre, s'étale et est présenté 'au populaire'. Le populaire encaisse, trouve très drôle. Ce cubisme-là pourtant n'est pas drôle, il est faux. Démarquage sans finesse de travaux sérieux (Léger en est-il triste ou gai ?). Formule chipée et brutalisée par un barioleur."
Mais Le Corbusier, dans ses lettres préalables au Bûcheron (27 mai 1923) :
"La publicité que vous organisez sur les palissades de Paris est certainement la plus intéressante qu'on ait conçue en ce moment et on peut dire qu'elle est vraiment esprit nouveau."
LE MANIFESTE DE 1926
Cassandre lui-même, L'Affiche (décembre 1926) - Texte fondamental :
Sur l'art de l'affiche :
"L'affiche n'est pas, ne doit pas être, comme le tableau, une œuvre que sa 'manière' différencie à première vue, un exemplaire unique destiné à satisfaire l'amour ombrageux d'un seul amateur plus ou moins éclairé ; elle doit être un objet de série reproduit à des milliers d'exemplaires, tel un stylo ou une automobile."
Sur sa méthode :
"Fidèle à ma méthode géométrique ou, plus exactement, architecturale, je m'efforce du moins d'assurer à mes affiches un 'plancher des vaches' indéformable."
Sur la primauté de la lettre :
"Car l'affiche n'est pas un tableau. C'est avant toute chose un mot. C'est le mot qui commande, qui conditionne et anime toute la scène publicitaire."
Sur la création :
"Je n'ai qu'un seul souci, me renouveler perpétuellement. [...] Chaque affiche est une expérience nouvelle à tenter ou plutôt une nouvelle bataille à tenter, à livrer."
LES ANNÉES DE GLOIRE (1927-1935)
Sur l'Étoile du Nord et le Nord-Express
R.L. Dupuy, Vendre (juin 1927) :
"Avant toute chose, saluons bien bas le succès inespéré, phénoménal, déconcertant... encourageant : il s'est trouvé un homme pour vendre à la Compagnie du Nord deux affiches de Cassandre. N'en doutez pas, cet homme est un héros."
R.L. Dupuy sur l'Étoile du Nord :
"En pleine gare du Nord, alors qu'ils songent en général à se hâter vers la sortie, de nombreux voyageurs s'arrêtent devant cette affiche et la regardent avec attention."
Sur L'Intransigeant
Louis Chéronnet, L'Art vivant (1926) :
"Celle où je crois avoir trouvé ma pleine mesure." [Cassandre lui-même]
Sur Pivolo
Cassandre expliquant sa méthode :
"Pour PIVOLO, par exemple, mon affiche préférée avec celle de L'INTRANSIGEANT, parce que les clients les ont acceptées d'emblée telles que je les avais conçues et réalisées sans aucune discussions, pour Pivolo donc c'est le conseil du célèbre pilote instructeur : 'Et puis vole haut !', popularisé dans toutes les écoles d'aviation et déformée en 'Pivolo', dont j'ai tiré par voie de calembour (pie vole haut) l'oiseau noir et blanc que j'ai schématisé afin de symboliser le nouvel apéritif."
RECONNAISSANCE INTERNATIONALE ET THÉORISATION (1929-1930)
Cassandre, préface de L'Art international d'aujourd'hui - La publicité (1929) :
"Comme elle échappe au 'Musée' ou à la 'Collection', la Publicité échappe à tout jugement. Elle est quelque chose comme l'amour : on ne la JUGE pas – on la SUBIT. Elle n'est plus un jeu, mais un phénomène naturel comme la nuit et le jour ; une des plus belles conséquences de l'activité contemporaine : la VIE même."
Cassandre sur sa conception de l'affiche (vers 1930) :
"Une affiche doit porter en elle la solution de trois problèmes : 1. OPTIQUE – 2. GRAPHIQUE – 3. POÉTIQUE [...] Image liée à un mot (ou un nom), le but d'une affiche est de créer autour de cette image-mot une série d'associations d'idées très simples et des associations d'idées qui ne sauraient être oubliées."
Et sa formule choc :
"Ainsi l'affiche ne sera donc pas forcément plaisante ni sympathique, pourvu qu'elle soit émouvante. On ne lui demande pas de se faire aimer ou comprendre, seulement de se faire subir. Elle est à la Peinture ce que le viol est à l'amour."
LA TYPOGRAPHIE RÉVOLUTIONNAIRE
Sur le Bifur (1929)
Charles Peignot :
"Ni Cassandre, ni nous n'avons voulu faire une 'jolie chose'. Nous avons voulu construire un type publicitaire : supprimer de chaque lettre ce qui est inutile à distinguer des autres."
R.L. Dupuy, critique acerbe dans Vendre :
"Bifur se présente à nous nanti d'une déclaration en bonne et due forme dont on se demande seulement avec inquiétude, si elle est davantage un panégyrique ou un manifeste 'dada'."
Maximilien Vox (défense) :
"Bifur est la plus grande chose faite depuis 500 ans."
Blaise Cendrars (soutien) :
"Puissiez-vous découvrir... le mot géant et simple pour faire pendant au-dessus de Paris de l'affiche monstre du Bébé Cadum… C'est pour imprimer ce mot-là que Bifur a été fondu."
Marcel Jacno (témoignage) :
"Dans le hall du Bœuf sur le toit, j'aperçut un alphabet sur métal joliment encadré. C'était le caractère Bifur dessiné par Cassandre… Bifur m'a donné l'envie impérieuse d'en faire autant."
Sur le Peignot (1937)
Charles Peignot (après-guerre, philosophe) :
"C'était la rupture quelque peu scandaleuse dans un art et un milieu particulièrement traditionnalistes, qui démolissait quelques tabous et eut le mérite de nous libérer nous-mêmes."
Jérôme Peignot :
"Après quatre années d'efforts pour parachever son caractère, Cassandre est tout de même parvenu à en avoir raison. À elle seule, cette prouesse fait de son alphabet un jalon historique de l'écriture."
L'APOGÉE CRÉATIF : DUBONNET ET NICOLAS
Dubonnet (1932)
Arts et Métiers graphiques (n°32, novembre 1932) :
"Nous ne saurions trop féliciter la maison Dubonnet du choix heureux de sa triple affiche dont l'apparition met, sur les murs de Paris une note de gaîté qui a surpris agréablement le public et les techniciens. Cette affiche vivante témoigne d'une transposition sur le plan graphique de la technique du cinéma."
Marcel Zahar :
"Le petit personnage au chapeau melon, incarnation de Monsieur-Tout-le-Monde."
Mune Satomi (témoin de la création) :
"J'étais avec Loupot dans l'atelier de Cassandre quand soudain l'idée lui vint et il se mit à danser de joie."
Savignac sur l'influence :
"C'est le jour où Cassandre a fait Dubo-Dubon-Dubonnet, rompant avec les objets et les machines, retrouvant Guignol et au-delà de la caricature, l'humain, qu'il a ouvert ma fenêtre."
Nicolas (1935)
Raymond Mason :
"Le Nicolas était une sorte de sublime vocifération graphique, une ivresse chorégraphique de plans syncopés où tourbillonnaient follement des masses de cercles concentriques de teintes crues : jaune, orange, violet, vert."
Marcel Zahar :
"Une fulgurance de son génie créateur qui ne récidivera jamais dans cette ligne magistrale, hors des modes et hors du temps."
L'EXPÉRIENCE AMÉRICAINE (1936-1938)
Ernestine Fantl, préface du catalogue MoMA (1936) :
"Il [le bonhomme Dubonnet] a le charme universel de Mickey Mouse."
Fortune Magazine (mars 1937) - présentation de ses projets :
"Si vous pensez que M. Cassandre prend le subconscient trop au sérieux, souvenez-vous que ses idées sont solidement fondées et que le subconscient est sans doute la chose la mieux partagée sur terre."
Cassandre lui-même (bilan amer de 1937) :
"Quant à moi, j'avais cru autrefois sentir une vie intense dans la publicité et qu'elle permettrait une intervention constante dans le déroulement des jours et de la société, qu'elle serait pour moi un moyen d'exprimer une certaine forme d'activité. Malheureusement je me suis rendu compte peu à peu qu'elle était en fait uniquement dominée par des intérêts particuliers."
Marcel Jacno (sur la solitude new-yorkaise) :
"Le camarade d'exil Cassandre était, malgré sa réussite, réputé pour son caractère noir… Sa peinture était froide et inefficace. C'était sans doute cette impuissance qui le rongeait car il ne l'ignorait pas, d'où sans doute son humeur."
LA GUERRE ET LA PEINTURE (1939-1945)
Exposition Drouin (1942)
René Barotte, Comoedia (21 novembre 1942) :
"Nous aimerions y trouver plus de sensibilité et même de science. Seuls les paysages réservent d'aimables surprises."
Lucien Rebatet, Le Petit Parisien (28 novembre 1942) :
"Cela signifie-t-il que Cassandre ait réalisé ses ambitions ? Il s'en faut de beaucoup et même de tout… Les éléments sont assez mièvres, disparates et maladroits."
Derain (selon Henri Mouron) :
"Pour la peinture, vous vous gourez, mais pour le théâtre, vous avez compris le truc."
Correspondance personnelle
Cassandre à Lola Saalburg (18 février 1945) :
"Seule la peinture reste ma raison de vivre. Mais elle est avare, oh ! combien et ne me donne guère."
Cassandre à Lola Saalburg (19 février 1945) :
"Aujourd'hui, ma peinture ne me nourrit plus d'autant moins que depuis que nous sommes libres il faut être cubiste ou communiste pour connaître les faveurs de ces messieurs de la rue de la Boétie. Ma petite peinture désuète en est bien loin !"
LE THÉÂTRE : RÉVOLUTION SCÉNOGRAPHIQUE
Théories
Cassandre (texte manuscrit sur le théâtre) :
"Faire un décor c'est avant tout organiser un espace : l'espace scénique. Ce n'est pas une peinture agrandie comme, depuis Diaghilev, on le voit trop souvent. Cet espace est destiné à mettre en valeur et à propulser vers le public un acteur."
Sur la "sur-proportion" :
"L'espace figuré est d'autant plus bénéfique que l'objet qu'il contient n'est pas tout à fait à sa mesure (à la même échelle). Il devient alors insolite et substance poétiquement recevable."
Don Juan à Aix (1949)
Cassandre expliquant son projet :
"Au moment où les organisateurs du Festival international de musique d'Aix–en-Provence me demandaient la décoration du Don Giovanni de Mozart, il n'y avait pas de théâtre d'opéra à Aix, mais seulement une cour, celle de l'ancien Archevêché."
Pierre Jean Jouve (témoin ébloui) :
"Salle fourmillante aux armatures de bois blanc, dont le plafond était le ciel sombre étoilé. [...] Scène petite et grande. Des personnages saillants, d'une dimension particulière, se plaçaient dans le Musique en un espace juste, tandis que leur éclatant tableau recevait, par en haut, le démenti de la nuit. Une visibilité extrême, en raison de ce contraste. Sentiment d'une féérie réelle, humaine, et par là plus universelle que la nuit."
Guy Blanchard, critique canadien :
"Le décorateur Cassandre a pénétré Mozart plus intimement qu'on ne l'avait encore fait."
John Cage, New York Herald Tribune (seul bémol) :
"Les spectateurs étaient facilement distraits par les cloches égrenant les heures dans une église voisine, le chant de quelque rossignol égaré ou la simple contemplation des étoiles dans le ciel."
L'échec de Phèdre (1959)
Pierre Jean Jouve (défense) :
"Cet effort de style, donc de beauté dans l'ordonnance, a rencontré aussitôt la plus virulente et grossière cabale de journaux que l'on eut vue depuis longtemps ; ce fut un concert bien conduit d'animosités et d'erreurs."
Claude de Boisanger (témoin des répétitions) :
"Un matin… je l'entendis [Cassandre] dire à deux jeunes pensionnaires éberluées qu'il 'auditionnait' dans le rôle d'Aricie : 'Mesdemoiselles, décidément, vous n'y comprenez rien. Du reste, la question est simple : croyez-vous au droit divin ? Si vous n'y croyez pas, inutile de continuer.' 'Et puis' ajouta-t-il au bout d'un instant : 'allez-vous à la messe ? Comment jouer les tragédies de Racine lorsqu'on n'y va pas ?'"
TÉMOIGNAGES SUR L'HOMME ET LE CRÉATEUR
Sa méthode de travail
Savignac (son assistant) :
"Il travaille à la détrempe sur du papier toilé tendu sur un châssis. Aux dimensions réelles de l'affiche qu'il doit réaliser. Lorsqu'il n'est pas content de son esquisse, on apporte la toile dans le jardin et là, on la passe au jet. On efface tout. Et il recommence. Avec une joie renouvelée et forte. Parce qu'il sait réussir."
Savignac sur sa pédagogie :
"Pour apprendre, je n'ai qu'à le regarder, ouvrir mes oreilles et l'écouter. Car tout en travaillant, il parle. Il commente tout haut ce qu'il va faire, ce qu'il compte obtenir comme effet. Il juge, il trie, il retient. Et cette sécrétion orale qui ne s'adresse pas à moi est le meilleur des enseignements."
Sa personnalité
Henri Sauguet :
"L'œil de Cassandre nous a tout de suite imposé ses particularités, son évidence, sa présence insolite, par le moyen le mieux propre à surprendre, à étonner, à frapper : l'affiche."
Henri Sauguet sur son caractère :
"Son caractère entier et vif, ses brusqueries, ses emportements, ses violences."
Gabriel Dussurget :
"J'étais particulièrement fasciné par la personnalité de Cassandre, un homme en colère mystérieux."
Savignac sur son évolution :
"Il était devenu irritable. Mais comme nous ne nous voyions pas souvent, je n'avais pas de raison de l'agacer beaucoup. Quoiqu'avec lui, on ne savait jamais sur quel pied danser."
Lola Saalburg :
"Debout, parlant bas, la tête baissée, dans cet état de colère sourde qui ne le quittait plus depuis bien longtemps."
LES DERNIÈRES ANNÉES ET LA MORT
Correspondance des dernières années
Cassandre à Lola Saalburg (29 juin 1954) :
"Il faut que je songe à mes amis 'lumineux' que sont Balthus, Jouve et Reverdy."
Cassandre à Lola Saalburg (24 août 1955) :
"Suppression totale des Maxiton et Cie et surtout, surtout le retour de ces précieux émerveillements devant la nature perdu depuis tant de mois (sinon d'années)."
Cassandre à Lola Saalburg (29 juin 1958) :
"La fiction racinienne qui m'a fait vivre dans un autre monde ces trois derniers mois, une fois rompue et confiée aux tiroirs, je me retrouve aujourd'hui comme un idiot s'entêtant à subsister dans un monde qui ne le concerne plus."
Sa mort (17 juin 1968)
Raymond Mason (lettre à Odile Pascal, 9 juillet 1968) :
"Avec le docteur Legendre, je suis allé à son lit de mort. Dans un appartement brillant de propreté, notre ami, vêtu avec grand soin, était étendu dans une position de repos absolu, une main sur le cœur, les pieds croisés, les plis de l'oreiller faisant une étoile autour de la tête noble et ferme."
JUGEMENTS CRITIQUES ET POSTÉRITÉ
Sur son génie créateur
Raymond Mason (1966) :
"Le geste initial de Cassandre était le bon. Il est descendu dans la rue... Regardez ces œuvres vieilles de trente-cinq ans ! Pourquoi cet éclat, pourquoi cette fraîcheur ? Pourquoi nous remplissent-elles de bonheur ? A ne pas douter, parce qu'elles étaient faites pour la grande lumière du jour, parce qu'elles se situaient dans la vie, dans la joie de la rue. Là où elles parlaient aux gens..."
Alain Weill (analyse contemporaine) :
"Cassandre dans tout ce qu'il a touché dans le domaine des arts graphiques ou même de la scène [...] n'a cessé d'être un inventeur. Des inventeurs il y en a peu. Il y a des virtuoses mais avoir des gens qui trouvent à la fois des voies nouvelles et des idées complètement neuves et qui arrivent à les appliquer dans un style qui est lui aussi d'un temps en avance sur celui de leur temps. C'est une chose très rare."
Alain Weill sur sa place dans l'histoire :
"Il n'est pas le meilleur, il est simplement hors concours ! Les plus talentueux de ses pairs le reconnaîtront."
Sur le paradoxe affichiste/peintre
Alain Weill :
"Comme l'immense majorité des gens qui ont connu la gloire dans la publicité en tant qu'affichiste il veut avoir sa reconnaissance comme vrai artiste. [...] À ma connaissance aucun des grands affichistes dont je peux vraiment dire qu'il mérite de figurer dans l'histoire de l'affiche ne mériterait et ne figure d'ailleurs dans l'histoire de la peinture."
Savignac :
"Tout le temps que Cassandre a fait des affiches, je crois qu'il a été un homme heureux."
Citations sur ses innovations spécifiques
Pierre Faucheux (sur ses travaux pour Signes, 1946) :
"Ses inventions perspectives pour présenter la mode et ses dessins vinciniens m'éblouissent encore."
Paul Morand (lettre à Cassandre sur Champions du monde) :
"Une affiche qui sait persuader sans violence ni vulgarité, une publicité qui laisse dans le contentement celui qui la subit, qui laisse derrière soi non des victimes ou des furieux, mais des admirateurs, c'est unique."
Sur le choix du pseudonyme
Alain Weill :
"Pourquoi s'est-il appelé Cassandre. Il paraît assez évident qu'il a choisi là le personnage mythologique de cette fille du roi Priam [...] qui finalement annonçait aux Troyens des nouvelles qui n'étaient pas forcément agréables. [...] Le côté annonciateur de Cassandre par rapport à ce qui allait se passer est certainement un bon exemple [...] C'est vrai que la suite de l'histoire peut être que sans le savoir et sans en mesurer les conséquences. Il s'était donné lui-même un nom qui allait très bien correspondre à la fin de sa vie de sa carrière."
BILAN FINAL
Cassandre lui-même (1960, Feuilles mortes) :
"La règle d'or ne doit que préciser la proportion idéale antérieurement pressentie par l'instinct : un moyen de vérification et non un système de composition, voué à la mort comme tous les systèmes."
Henri Mouron (son fils) :
"A l'aube, le rêve dissipé, tout le palais s'enlevait lentement dans les cintres pour ne laisser la place qu'à un paysage crayeux brûlé de soleil où le 'jeune homme' retrouvait pour ne plus la quitter son ombre, fidèle compagne de sa solitude, sur le martellement des cuivres de la belle musique de Sauguet."